À l’occasion du Festival International de la BD d’Angoulême, l’auteur Chang Sheng a répondu à nos questions lors d’une interview !
Interview avec Chang Sheng : à propos de votre carrière ?
Après 15 ans dans la publicité, vous avez décidé de vous tourner vers le manga. Qu’est-ce qui vous a motivé à prendre cette décision ?
En réalité, comme beaucoup d’autres artistes de bande dessinée, j’ai adoré lire des bandes dessinées et en dessiner depuis mon enfance. J’ai même rêvé de devenir un bon auteur de BD moi-même. Cependant, en grandissant et en entrant dans le monde du travail, ce rêve s’est estompé sous la pression de la vie et d’une carrière bien remplie (à tel point que j’ai même arrêté de lire des BD, car j’étais trop occupé).
Ce n’est qu’au bout de 15 ans de carrière qu’un matin, en me préparant pour aller travailler, j’ai eu une révélation : « Ah, mais oui, ce que j’aime le plus, ce sont les bandes dessinées ! » Cette année-là, j’avais 35 ans, un âge délicat pour poursuivre un tel rêve. Je me suis dit que si je ne me lançais pas maintenant, je n’en aurais peut-être jamais l’occasion. J’ai donc démissionné de mon poste de Directeur de Création chez Dentsu Young & Rubicam Taiwan. Même si j’échouais, cela n’avait pas d’importance : il fallait que je tente ma chance !
Aujourd’hui, j’ai 57 ans et je crée toujours.
à propos de vos inspirations ?
Quel artiste vous inspire le plus ?
Pour les œuvres, je dirais Ashita no Joe de Tetsuya Chiba.
Pour les auteurs, je dirais Hoshino Yukinobu (NdlR : 2001 Night Stories, entre autres).
Quelle est votre œuvre préférée ?
2001 Night Stories de Hoshino Yukinobu.
Quelle est votre dernière découverte préférée ?
The Banana Sprout de Zuo Hsuan.
Quelle œuvre mériterait plus de succès selon vous ?
Moonlight Mile de Yasuo Ohtagaki.
Et concernant vos méthodes de travail ?
Comment travaillez-vous sur vos pages ? Scénarios, storyboards, encrage ?
Je pense qu’une bonne histoire naît souvent d’une idée centrale simple mais très captivante.
En général, je commence par trouver une idée simple mais intrigante pour créer une histoire. Je teste cette idée en voyant si elle peut être résumée en une seule phrase. Si je la trouve forte, je passe alors à son développement et à la construction de l’histoire autour d’elle.
Cette approche « de l’intérieur vers l’extérieur » – partir d’une idée centrale pour construire une structure narrative complète – permet d’établir des relations de cause à effet et des rappels narratifs, tout en permettant une manipulation créative du temps et de la séquence. Une fois que je commence à raconter (ou dessiner) l’histoire, je passe à un processus « de l’extérieur vers l’intérieur », en dévoilant progressivement l’intrigue couche par couche jusqu’à son cœur.
Ce qui est particulièrement spécial dans mon processus de création de storyboards et d’encrage, c’est que, pendant plus d’une décennie avant de créer Nine Lives Man, je travaillais en création numérique avec une tablette Wacom. Quand j’ai commencé Nine Lives Man, j’ai essayé de revenir au dessin traditionnel à la main. Cette transition n’a pas été facile pour moi. Sans assistant et devant tout faire moi-même, j’ai progressivement augmenté la proportion de dessin manuel jusqu’à ce qu’il devienne aujourd’hui ma méthode habituelle de création.
Avez-vous des assistants ? Si non, comment organisez-vous votre travail (temps) ?
Non. Je me lève à 7 h chaque jour, je travaille en moyenne 10 heures par jour, et 6 jours par semaine. Je ne peux pas veiller tard – je suis un travailleur diurne très régulier.
Utilisez-vous des références ? Mangas, films, photographies ?
Bien sûr, en plus des références basées sur les connaissances (comme celles liées aux costumes et maquillages d’opéra de Pékin), il m’est aussi arrivé de sortir pour filmer des références ou même d’enregistrer mes propres mouvements corporels et gestes, etc.
Et concernant l’apparence de Billy Oldman ? (NdlR : qui a des traits similaires à ceux de Sean Connery)
Comme vous pouvez le deviner, l’inspiration pour le personnage de Billy Oldman vient de l’acteur britannique Sean Connery. Aux premières étapes du développement de l’histoire, j’ai réalisé que le personnage devait être un homme âgé plein de sagesse, avec peut-être une pointe d’humour. C’est pourquoi j’ai personnellement essayé d’incorporer l’image de mon acteur préféré dans l’histoire. Sean Connery est décédé en 2020, et il reste à ce jour mon acteur britannique préféré.
À propos de Yan ?
Si la chanson de Mirai avait une mélodie, laquelle serait-ce ?
幸せなら手をたたこう (Si tu as de la joie au cœur, frappe des mains)
Hmm… Je suppose que c’est quelque chose comme ça ? C’est le genre de sentiment que l’on trouve dans une chanson japonaise pour enfants bien connue.
Quel est votre super-héros ou super-héroïne préféré(e) ?
Spider-Man.
Comment progresse l’adaptation cinématographique de Yan ?
Le projet est actuellement en pause. Les défis liés à la pandémie il y a quelques années, ainsi que les facteurs financiers actuels, semblent être une combinaison de raisons que je ne comprends pas complètement. Comme je ne me suis pas profondément penché sur ces questions, je ne peux que dire que l’état actuel est en pause.
Vous êtes impliqué dans la production du film. Avez-vous déjà dû insister sur des changements ?
J’ai insisté sur deux choses seulement. La première, c’était que « une actrice d’opéra de Pékin devienne une super-héroïne » – je voulais rester fidèle au concept original. La seconde, c’est que le film devait être bon – terriblement bon.
Une suite à Yan est-elle envisageable ?
Ah ! Oui, il y en aura une. Sa sortie est prévue au printemps 2026 à Taïwan.
Vous pouvez retrouver l’auteur en dédicace à la librairie La Planète Dessin, à Paris ce mercredi 29 janvier 2025, de 14h30 à 17h30.
Mais aussi notre review de son manga Yan !
Merci à Hugo Esquenet de Warningup et surtout à Monsieur Chang Sheng pour ses réponses.