La review du jour concerne la dernière pépite de Mangetsu. Voici mon avis sur BIBLIOMANIA, une revisite d’Alice au Pays des Merveilles !
BIBLIOMANIA, one-shot !
C’est dans un écrin particulièrement somptueux que les éditions Mangetsu nous proposent BIBLIOMANIA. En effet, l’ouvrage dispose d’une couverture épaisse et cartonnée. En guise d’illustration, on retrouve le motif du livre dont il est question dans l’oeuvre. J’aime beaucoup ce choix, complètement méta et en plein accord avec l’expérience que nous proposent les deux auteurs.
Petite particularité du titre : c’est un manga qui se lit de gauche à droite, en sens de lecture occidental donc.
On pourra reprocher au manga son prix, 22,95€ c’est tout de même onéreux. Néanmoins, au vu de la qualité et du nombre de pages (336 pages), cela me semble justifié.
Alice se réveille dans la chambre 431 d’un étrange manoir, dont le majordome revêt les allures d’un mystérieux serpent. Malgré les tentatives de dissuasion de son hôte, elle décide d’en franchir le seuil afin de remonter, chambre après chambre, jusqu’à la porte 000, celle qui lui permettra de rejoindre le monde extérieur. Mais ce sésame aura un prix et chaque nouvelle chambre la plongera toujours plus profondément dans les méandres de l’âme humaine…
Au fond du terrier…
BIBLIOMANIA, c’est l’histoire d’Alice, une jeune fille qui se réveille dans un espace étrange, d’un blanc immaculé. Seule une porte s’y trouve. Alors qu’elle tente de l’ouvrir, un dénommé Ophis apparaît. Moitié serpent, moitié maître d’hôtel, ce dernier lui explique la situation. Elle est coincée dans un livre magique, mais en échange, elle peut obtenir tout ce qu’elle désire. Cependant, Alice est déterminée à quitter ce lieu, et pour cela, elle doit parvenir à la page 0. L’histoire que nous propose Orval est donc assez linéaire au départ.
On suit le voyage d’Alice à travers les pages, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est déroutant. De nombreuses situations s’enchaînent, chacune plus étrange que la précédente. Du morbide au chimérique, cette course est dépaysante. Qui plus est, le récit est entrecoupé de flashbacks, ce qui contribue à une sensation cauchemardesque. Néanmoins, le titre se conclut sur un retournement de situation vraiment surprenant. Je l’ai personnellement trouvé trop brut et dense, mais je reconnais qu’il clôt de manière intéressante et imprévisible le récit.
Scénario : 4/5
Visuellement, BIBLIOMANIA est une véritable expérience « sensorielle ». Le trait de Macchiro foisonne de détails, avec belle gestion des noirs qui permet à l’ensemble de rester plutôt lisible. C’est un dessin très organique, qui tend très vite vers l’horrifique. Cela m’a rappelé Berserk. Peut-être est-ce une influence directe ? Ou alors les deux oeuvres partagent une inspiration commune, comme Gustave Doré par exemple ? Toujours est-il que les deux oeuvres présentent des visuels similaires. Cependant, c’est parfois tellement dense d’éléments que les actions perdent de leur clarté.
Au fur et à mesure qu’Alice ouvre des portes, on découvre des salles différentes, aux ambiances parfois totalement opposées. Le dessinateur fait ainsi l’étalage de son talent en décrivant tout un tas d’atmosphères. Tantôt infernales, tantôt oniriques, ces situations multiples nous surprennent et nous fascinent irrémédiablement. J’aime beaucoup tous les symboles qui sont disséminés ça et là, les références à l’imaginaire collectif. L’oeuvre acquiert, de mon point de vue, une portée intemporelle.
Visuels : 4/5
S’il s’inspire de Alice aux Pays des Merveilles, BIBLIOMANIA propose des messages qui lui sont propres. En posant le fait que chaque résidant d’une salle puisse matérialiser n’importe lequel de ses souhaits, l’oeuvre propose un questionnement que j’ai trouvé intéressant. Choisir entre être captif et voir tous ses désirs assouvis, ou être libre mais devoir se démener pour obtenir ce que l’on souhaite. Le titre trouve ainsi sa pertinence en faisant d’Alice une voyageuse qui rencontre d’autres personnages captifs, et qui fait voler en éclat leurs certitudes.
Grâce au format de son récit (une salle, un personnage, une histoire); Orval aborde différentes thématiques, qui font écho à des problématiques humaines (immortalité, famille, connaissance, harcèlement…). Inévitablement, on a une impression de survol, néanmoins, les différentes rencontres d’Alice s’imprègnent dans notre esprit. À mon sens, c’est, en quelque sorte, un joli parallélisme d’une des thématiques principales : de la même manière que ces idées nous restent en tête, les écrits sont capables de nous survivre.
Thématiques : 4/5
Cependant, la plus grande force de BIBLIOMANIA à mon sens, c’est la proposition artistique de ses deux auteurs. Du côté de Macchiro, on retrouve un découpage très audacieux. Le dessinateur joue littéralement avec les conventions du format, il déforme les cases, il tord les codes pour qu’ils servent totalement le récit. Ainsi, si l’histoire nous présente chaque chambre comme un paradis pour celui qui y réside, visuellement, elle a tout d’un enfer difforme et malsain. Mieux encore, chaque « mini univers » est à l’image du personnage qui l’habite, comme une sorte de paysage intérieur.
En ce qui concerne Orval, son inventivité réside dans le concept même de l’histoire. Si au départ il est plutôt question d’un hôtel avec des chambres, on comprend très vite qu’il s’agit plutôt d’un livre et de ses pages. L’oeuvre est ainsi une invitation à cultiver son imaginaire et est finalement une mise en abyme de l’expérience même de lecture. Cette idée est d’ailleurs parfaitement reprise par l’objet livre lui-même, et je trouve ça génial ! L’ensemble a quelque chose de magnétique, d’hypnotique que j’ai vraiment adoré.
Créativité : 5/5
BIBLIOMANIA, en résumé :
💎 Les points forts :
- La créativité visuelle et narrative du titre
- Des visuels hyper détaillés, avec des mises en scènes très inspirées.
- Une ambiance horrifique, presque ensorcelante.
- Une thématique principale et d’autres messages intéressants.
- Un final surprenant qui appelle une relecture.
- Un objet-livre magnifique
🪨 Les points faibles :
- Une intrigue assez linéaire.
Note globale : 17/20
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