Sakamoto Days est la dernière grosse sortie des éditions Glénat ! Voici mon avis sur la première série de Yuto Suzuki !
Reconversion professionnelle: d’assassin de légende à épicier de quartier
Pour la sortie de Sakamoto Days, les éditions Glénat ont décidé de sortir les deux premiers tomes de manière simultanée. L’édition se place dans les standards de l’éditeur; pas de page couleur mais un papier souple, qui n’est pas transparent.
En ce qui concerne les couvertures, ce sont celles de l’édition japonaise. Il faut dire qu’elles sont particulièrement réussies. Pour ma part, je trouve qu’elles donnent très bien le ton du manga: une part d’absurde et une autre d’action.
Taro Sakamoto est un père de famille rondouillard gérant d’une supérette de quartier. Qui croirait qu’il s’agit en réalité d’un ex-assassin légendaire, craint et admiré par tous les truands?! Découvrez à quoi ressemble le quotidien surréaliste de cet homme qui protège sa famille de tous les dangers!
Et sous ces couvertures, on peut découvrir de petits strips sympathique! Des bonus appréciables!
Sakamoto Days: le quotidien d’un homme qui protège sa famille
Sakamoto Days se présente avec un postulat original: celui d’un assassin reconverti en épicier. La situation de départ est simple, bien décrite, et on plonge finalement très facilement dans cet univers. La lecture n’en est que plus fluide.
Dans le premier tome, on a surtout l’impression de lire une succession d’histoires courtes. Évidemment elles s’inscrivent dans une continuité et décrivent le nouveau quotidien de notre protagoniste; mais elles ne sont pas intrinsèquement liées. Cela confère un rythme plutôt rapide au récit, qui permet de planter le décor et d’introduire les personnages sans donner l’impression de s’apesantir sur ces points. Au final, la lecture semble presque trop courte…!
Cependant, l’auteur nous montre qu’il est capable de faire durer un peu plus ses histoires en proposant un arc palpitant qui s’étale de la fin du tome 1 jusqu’à plus de la moitié du tome 2. La construction de l’arc est assez convenue; le déroulement des évènements n’est pas novateur; mais ça reste efficace et prenant. Je reconnais avoir pris beaucoup de plaisir à la lecture.
Le gros reproche que je ferai à la série pour l’instant, c’est l’absence d’un fil conducteur. J’ai trouvé assez difficile de se projeter dans l’aventure en l’absence d’un objectif précis, d’une intrigue claire. Quelques bribes de l’univers nous sont données, et elles pourraient faire office d’un fil rouge; néanmoins, nous n’avons pour l’instant rien de concret.
Oscillant entre les histoires courtes et les arcs un peu plus long, la série est pour l’instant un hybride et on peut se demander quel rythme elle choisira. Parviendra-t-elle à se renouveler ? Ce sera tout l’enjeu du tome 3!
Scénario : 3/5
Pour ce qui est du découpage, Sakamoto Days propose quelque chose de classique mais efficace. Comme son déroulé finalement. Néanmoins, on peut noter des mises en scènes qui cherchent l’audace et le spectacle. Cela apporte une certaine nervosité, un dynamisme qui vient mettre en valeur à merveille les scènes d’action du manga.
Attenante à cela, la façon de narrer l’histoire sort un peu des sentiers battus. Le fait que l’auteur passe souvent par la télépathie de Shin pour faire parler le mutique Sakamoto est une jolie trouvaille qui apporte une touche rafraîchissante.
Du côté des décors, on passe des rayons de la supérette, aux hangars désaffectés en passant par des entreprises paravents ou des parcs d’attraction. C’est relativement varié, et l’auteur s’en sort brillamment. Au final, cela nous permet de bien nous projeter dans cet univers.
En revanche, en ce qui concerne le design des personnages, je n’ai rien trouvé de transcendant. Enfin… Taro Sakamoto mis à part. Son apparence est vraiment atypique pour le coup, et qui joue énormément sur l’aspect humoristique. Les autres personnages manquent quant à eux de personnalité, en cela qu’ils sont banals.
Fort heureusement, Yuto Suzuki a un trait expressif avec lequel il peut jouer allègrement pour apporter plus de vie à l’oeuvre. Il est ainsi capable de détourner une scène très sérieuse en une situation cocasse rien qu’avec une mimique.
Visuels : 3,5/5
Vous l’aurez compris je pense, Sakamoto Days est un savant mélange d’action et d’humour.
De l’action, on en a à foison grâce aux tentatives d’assassinats, aux courses poursuites, ou aux missions d’infiltrations de nos protagonistes. Les scènes de combat sont particulièrement percutantes et tout en restant compréhensibles. On a des moments ultra badass, où notre héros bedonnant devient vraiment charismatique. (Ou hard-boiled comme dirait un certain Boil).
Ces situations violentes sont systématiquement désamorcées par des procédés humoristiques. Il y a évidemment le changement graphique, entre sérieux et humour. Mais il y a aussi l’intervention de l’absurde, avec des détournements ou des situations ubuesques.
Et pour ce qui est du comique, Yûto Suzuki dévoile une maîtrise épatante des différentes formes de comique. Évidemment, il y a du comique de situation; notre assassin ventripotent en est le meilleur exemple. On a aussi du comique de geste, notamment avec le personnage de Shin qui se fait « tuer en pensée » plusieurs fois.
Et évidemment… On a du comique de répétition ! Le seul problème avec cette forme, c’est de trouver le juste milieu entre le drôle et le redondant. C’est à l’appréciation de chacun, mais pour ma part, j’ai trouvé un peu des deux. C’était parfois bien exécuté, mais pas toujours. N’est-ce pas Boil?
En tout cas, je retiendrai d’excellentes trouvailles d’humour et une lecture qui arrache des sourires!
Action/humour : 4/5
Mais s’il y a bien un point où Sakamoto Days tire son épingle du jeu, c’est dans les personnages qu’il nous propose!
D’abord, il y a Taro Sakamoto. J’ai déjà parlé de son physique atypique, un peu de son caractère, mais son objectif est tout aussi original. Notre ex-assassin a changé de vie, si auparavant il tuait, il cherche désormais à protéger. En particulier, il souhaite garantir la tranquillité de son foyer.
Un foyer qui se compose de sa femme, Aoi, et de sa fille Hana. Les deux personnages n’interviennent que très peu dans le déroulement de l’intrigue, et pourtant elles y sont essentielles. Elles sont le garde-fou de notre tueur à gage, mais aussi sa raison de vivre. J’ai par ailleurs beaucoup aimé la relation entre Aoi et Taro, elle rappelle le coupe Goku/Chichi. L’idée des règles de vie à la maison et la crainte de notre ancien truand à leur égard sont des idées qui fonctionnent très bien.
Viennent ensuite les personnages secondaires. Shin est le premier à rejoindre Sakamoto et l’épicerie. Le jeune homme, en plus d’être télépathe, se révèle plutôt doué dans le métier d’assassin. La synergie qu’il y’a entre lui et notre épicier grassouillet est bonne, et les échanges télépathes permettent de la renforcer tout en lui donnant une singularité. Puis, c’est Lu Xiaotang, une mafieuse chinoise qui se joindra à l’aventure. J’avoue avoir beaucoup apprécié ce personnage. Elle possède une grande force mais aussi des failles intéressantes. (Et puis la boxe de l’homme saoul, c’est toujours aussi bien..!)
On a donc un trio qui fonctionne bien, avec une vraie alchimie, qui suscite notre attachement.
En revanche… En face, les antagonistes n’ont bien souvent pas le temps d’exister. Ils sont parfois effrayants, charismatiques. Mais les combats, même s’ils sont bien réalisés, sont expédiés et n’ont pas de réel enjeu… Bref, l’opposition est faible, et c’est dommage. J’attends vraiment de l’amélioration sur ce point par la suite.
Personnages: 4/5
Sakamoto Days, en résumé :
Sakamoto Days, c’est le quotidien de Taro Sakamoto, un ex-assassin au talent reconnu de tous, dans sa nouvelle vie d’épicier de quartier. Après avoir raccroché les silencieux, il ne désire qu’une chose: garantir la sécurité et le bonheur de sa famille.
Bien évidemment, son ancienne vie le rattrape toujours (sinon ce n’est pas drôle) et cela occassionne des situations cocasses. Tentatives d’assassinats, kidnapping, courses poursuites, infiltrations… C’est un quotidien mouvementé que vit notre commerçant bedonnant. Rien de transcendant, mais c’est prenant.
Et même s’il a d’excellent reste de sa vie d’avant, il arrive qu’il soit en difficulté. Heureusement, il peut compter sur Shin, un autre assassin télépathe, et sur Lu, une mafieuse chinoise. Ou même sur sa femme Aoi et sa fille Hana. Le casting est excellent, même si on regrette l’absence d’antagoniste marquant.
Visuellement, Yûto Suzuki nous offre de très belles séquences d’action, ainsi que des mises en scènes ambitieuses. Et malgré des designs un peu banals (hors Sakamoto évidemment), il parvient à faire vivre son récit grâce à un travail poussé sur les expressions des personnages.
Mais Sakamoto Days, c’est aussi et surtout du comique sous toutes ses formes! De l’absurde, des situations cocasses, des répétitions, des changements graphiques… Tout est là pour nous faire rire… Et ça fonctionne à merveille!
Pour terminer, j’aimerais dire que malgré ces petites erreurs, c’est une lecture que j’ai énormément appréciée, et que je recommande volontiers à ceux qui souhaitent se divertir!
Note globale : 14,5/20
L’avis de Monsieur J Sark
Sakamoto Days est un phénomène qui a frappé la France de plein fouet le 6 Avril. Il nous a ouvert les portes de sa boutique et nous embarque dans tous ses mystères.
Sakamoto Days c’est d’abord une histoire. Elle a ce qu’il faut de suspense et de mystère pour nous captiver dès le début. Comment notre héros se retrouve la ? Pourquoi est-il si craint ? Qui sont ses poursuivants ? Nous suivons l’histoire de cet homme dans sa petite vie de père de famille, dans sa petite échoppe, dans son petit quartier. Qui se retrouve poursuivi par tout ce qui se fait de plus retors et puissant en matière d’assassin. Au début, les actions et combats sont un peu bon enfant. Mais très vite ça monte en puissance et on sent bien que le public visé est plus adulte. J’aime beaucoup la construction linéaire du récit entrecoupé de nombreux flash-back plein d’informations.
Et cette histoire est bien sûr portée par ses personnages très bien travaillés et très charismatiques. Sakamoto, le héros, un gros monsieur débonnaire qui tient une échoppe avec sa petite famille. Il est taciturne et ventripotent. Il mène une petite vie pépère jusqu’au jour où une ancienne connaissance tente de le tuer. Et nous rencontrons un tout autre homme. Sakamoto la légende. Autour de lui gravite tout un petit monde. Sa famille déjà, avec sa femme, autoritaire et déterminée. C’est elle qui commande vraiment cette joyeuse bande. Sa fille qui est toujours là pour nous faire bien rire. Ses deux employés un peu fous, qui lui sauvent la mise, puis lui compliquent la situation c’est selon. Ils sont tous très bien construits, et très drôles. Mais il y a aussi les antagonistes. Tous très mystérieux, violents, et complètement cintrés. Ce qui met beaucoup de piquant dans l’histoire.
Et toute cette histoire est magnifiquement mise en place par des dessins de très bonne qualité. Nous avons tous ce qui fait un beau manga. Des dessins d’un style comique, des scènes d’actions à couper le souffle, beaucoup de détails dans le dessin, et énormément de dynamisme. Le découpage des cases est ce qui m’a beaucoup plus. On passe d’un case calme plat, a une action de dingue en une image. Tout va soit à fond, soit au ralenti. C’est extrêmement prenant finalement, car on est sur le feu tout le temps.
Pour moi nous sommes sur un grand manga qui va nous emporter loin. Tout, de l’histoire au dessin est bien travaillé, bien recherché et surtout nous attrape dans une course poursuite d’émotions à laquelle nous ne sommes pas préparés. Je préconise d’attacher sa ceinture avant la lecture de cette histoire.
Bien entendu, le père de famille d’une quarantaine d’années avec autre chose qu’un physique d’athlète olympique, ça m’inspire encore plus.
C’est un grand oui, un manga à mettre dans toutes les mains. Et comme on dit que je note trop gentil.