Alors que le tome 2 sort ce 2 novembre, voici mon avis sur le premier tome de Pakka, de Daisuke Imai aux éditions Mangetsu !
Daisuke Imai est de retour avec Pakka !
Déjà connu pour Sangsues, Destins Parallèles ou encore Instants d’Après; on retrouve cette fois Daisuke Imai avec Pakka.
« Je m’appelle Kei Suemori. Je viens d’entrer au lycée. Et au club de natation, je me suis fait laminer par une fille… »
Autrefois star de la piscine au collège, Kei se fait battre à plate couture par Saki Hanazono dès son entrée au lycée. Déterminé à conquérir le cœur de son amie d’enfance, le jeune homme, qui a toujours refusé les efforts, décide alors de lui imposer un pari : s’il parvient à lui arracher une victoire, elle devra sortir avec lui !
Mais comment se lancer à fond quand tout a toujours été trop facile ? Sa transformation en kappa suite à un baiser échangé avec sa camarade Shizuku Kawano changera-t-elle la donne ?! »
Encore une fois, Mangetsu chouchoute son titre avec une très jolie édition. À l’intérieur, le manga s’inscrit dans les standards du format, avec une qualité de papier et d’impression honnête. En revanche, du côté de la couverture, on a droit à un vernis sélectif original. En effet, il vient souligner les écailles de Shizuku Kawano ! C’est une belle réussite !
Passons à la lecture :
Dans Pakka, on suit l’histoire de Kei Suemori. Au collège, il était un des meilleurs nageurs de son club. Arrivé au lycée, il poursuit la natation mais… Il se fait battre à plate couture par Saki Hanazono; la star du club et accessoirement une amie d’enfance. Blessé dans son ego, il va alors lui proposer un défi (sous l’impulsion de son ami Maru) : S’il gagne la course, ils sortiront ensemble, si elle gagne, il s’engage à se donner à fond pour le tournoi interlycées. D’énormes sabots pour présenter une romance mais… La suite s’annonce plus complexe.
Lors d’un entraînement, Kei se noie. Il est alors secouru par Shizuku Kawano, nouvelle arrivante dans le club. Un sauvetage miraculeux, à bien des égards. Shizuku est en fait un Kappa, une créature aquatique du folklore japonais (d’où le titre du manga). Et en apportant son aide à Kei, elle a fait de lui un Kappa ! Daisuke Imai réussit ainsi à introduire, de manière très subtile, du fantastique dans son oeuvre. J’ai beaucoup aimé les petites références à ce yōkai.
Cela permet d’apporter une « urgence » dans l’oeuvre, car un Kappa peut mourir de dessiccation. Par la même, cela implique une relation très particulière entre Kei et Shizuku. Ils sont « pareils » et partagent cet important secret. Sport ? Fantastique ? Romance ? Des bases sont posées, des pistes introduites mais on a encore un peu de mal à voir où nous mènera cette histoire.
Scénario : 4/5
Visuellement, Pakka met un fort accent sur les ressentis des personnages, par l’intermédiaire notamment de visages très expressifs. Daisuke Imai limite les arrières plans, allant jusqu’à parfois les supprimer complètement. Il est également capable de proposer un découpage très inspiré, en destructurant complètement ses pages. En jouant sur les mises en scènes, il fait de son dessin un formidable vecteur d’émotions, tout en conservant une bonne fluidité de lecture.
L’ambiance globale est douce, presque feutrée grâce à des dessins dont la « colorisation » rappelle des aquarelles.
Malheureusement, j’ai trouvé le trait parfois un peu maladroit. Notamment dans la représentation des kappas… Leur design m’a paru vraiment très « amateur ». Je dessinais le même genre de transformation quand j’imaginais des personnages au collège. C’est dire..!
J’ai aussi noté du dessin assisté par ordinateur dans les passages où les décors avaient une importance significative. En ce qui me concerne, j’avoue que je ne suis vraiment pas fan de la technique.
Dessin : 3/5
Parmi les forces de Pakka, je citerai d’abord ses personnages. Le trio de protagonistes est vraiment convaincant. Kei est un personnage qui m’a impressionné par son réalisme. Il n’est pas timide, mais pas extraverti non plus. Sans être confiant, il n’est pas dénué d’ego. Au cours de ce premier tome, on découvre ainsi un personnage assez complexe et c’est super plaisant !
On retrouve un peu le même profil chez Saki, mais en moins approfondi évidemment puisqu’il ne s’agit pas du personnage que l’on suit.
Shizuku quant à elle ne brille pour l’instant pas par son développement, mais la relation qui la lie à Kei est très intéressante. D’un côté, elle cherche simplement un ami. De l’autre, il se rend compte de l’importance qu’elle a pris dans sa vie. L’ensemble a su me toucher.
En revanche, Maru et le coach du club de natation m’ont beaucoup moins convaincu. L’humour qui les caractérise ne m’a pas touché, je l’ai même trouvé lourd par moment. Selon moi, cela a tendance à desservir l’œuvre en l’alourdissant. Peut-être que les personnages comiques ne sont pas pour Daisuke Imai..?
Personnages : 4/5
L’autre point fort de Pakka, ce sont les différentes thématiques abordées, et la pertinence de leur association. Dans un premier temps, le récit parle de sport, de natation précisément. Et plutôt que de nous parler de compétition, Daisuke Imai fait le choix de traiter la notion de talent, et également celle de l’ego. J’ai trouvé l’idée vraiment intéressante, elle contribue à dresser un portrait complexe du personnage de Kei.
L’auteur lie cette thématique aux problématiques de l’adolescence. J’ai trouvé ça super intelligent, l’adolescence c’est la période de la vie où l’identité se forge, où l’ego se construit. Les sentiments se développent, on se cherche, on teste… C’est le terreau le plus fertile pour une romance à mon avis ! Le triangle amoureux proposé à quelque chose de très juste, loin des niaiseries que l’on peut trouver parfois.
L’adolescence, c’est également la période du développement humain où le corps change, où il acquiert les caractères adultes. Daisuke Imai associe ces changements à la figure folklorique du Kappa. Comme une analogie avec la puberté, Kei Suemori se transforme en Kappa: il n’a rien demandé, mais il doit faire avec. Il doit s’habituer aux nouvelles caractéristiques de son corps. Encore une fois, c’est un parti-pris des plus judicieux !
Thématiques : 5/5
Pakka, en résumé :
Pakka est une histoire que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire. Ce tome 1 pose des bases solides. On y découvre les portraits de personnages complexes : des adolescents qui se cherchent, qui se construisent.
Entre leur amour propre et leurs sentiments, ils sont parfois un peu perdus. Il faut dire que l’adolescence c’est un moment de grand changement pour chacun.
Daisuke Imai exploite très bien la période de la puberté. La question de l’amour est prépondérante, on suit les premiers émois de Kei Suemori, ses questionnements aussi.
Mais l’auteur va plus loin, et nous propose une analogie très pertinente. L’adolescence est une transformation inéluctable, vers l’inconnu, et il nous faut apprendre à composer avec.
De la même manière, Kei va être transformé en kappa, une créature folklorique japonaise, lorsque sa camarade Shizuku le sauvera de la noyade.
Dès lors, sa vie va basculer et il va devoir apprendre à gérer sa nouvelle nature. Ce faisant, il introduit un soupçon de fantastique qui apporte une saveur particulière à l’oeuvre, presque hors du temps.
Pakka est un seinen qui fait la part belle aux sentiments, ainsi qu’aux ressentis. Et le trait de Daisuke Imai ne fait qu’accentuer ce fait.
Les arrières plans s’effacent pour mettre en avant les expressions des personnages. Le découpage s’adapte aux situations, permettant des mises en scènes originales.
Un récit presque à fleur de peau, qui éveille une douce nostalgie à la lecture, et qui intrigue également par son côté folklorique et merveilleux.