Cet été, les éditions Kana nous ont permis de découvrir une oeuvre d’une autrice légendaire avec l’ajout de SHINKIRARI, de Murasaki Yamada.
SHINKIRARI, One-shot
Pour ce qui est de l’édition, SHINKIRARI se présente sous la forme d’un joli petit pavé de 386 pages, en grand format 21x15cm. On note la présence de pages en bichromie bleu pour le premier chapitre, ainsi que 40 pages environ de postface. Intitulée La vie et l’art de Murasaki Yamada, elle est signée Ryan Holmberg. Une mouture très soignée pour ce nouvel ajout à la collection Sensei de l’éditeur.
Je sais tout de mon mari.
Je connais la taille de ses caleçons, ses plats préférés, ses manies quand il est agacé, les actrices qui lui plaisent…
Je ne lui ai pas dit que j’avais pris du poids. Je me demande s’il l’a remarqué.
Est-ce qu’il me comprend ? Que sait-il de moi, sinon que je suis sa femme ?
« Les hommes sont libres, eux »
SHINKIRARI prend place dans les années 80, au Japon. Plus précisément au sein d’une famille, tout ce qu’il y a de plus normal. Le récit prend la forme d’une tranche de vie, et met en scène la mère de famille, la femme de ce foyer.
Au fil des saynètes, l’autrice tisse discrètement un fil rouge : l’émancipation de sa protagoniste. J’ai particulièrement apprécié la finesse de la façon de faire, l’intrigue semble passer derrière le quotidien.
Scénario : 4,5/5
Dans SHINKIRARI, on suit donc madame Yamada. Elle est l’archétype de la femme japonaise des années 80, la shufu. L’accent est ainsi mis sur sa servilité envers son mari et ses filles, le quotidien de cette époque pour une femme.
Cependant, à mesure que les pages défilent, on la voit prendre son envol, et c’est particulièrement porteur. J’ai aimé que son mari ne s’en rende pas compte de suite, et que ses filles remarquent les changements et s’adaptent.
Personnages : 4/5
D’un point de vue visuel, SHINKIRARI est plutôt atypique, ce qui peut évidemment se révéler clivant pour le lecteur. Le trait est simple, dans le sens où il ne conserve que l’essentiel, ce qui en fait un vecteur direct des émotions.
J’ai été frappé par la maîtrise du blanc dans les cases tout au long du récit. Murasaki Yamada compose avec le vide, avec l’espace de ses cases. Et, bien que les décors soient rares, on n’a jamais l’impression qu’ils manquent.
Visuels : 3,5/5
Le point le plus intéressant de SHINKIRARI selon moi, ce sont les thématiques qu’il aborde. J’ai aimé la justesse, l’authenticité des ressentis quand il était question de la charge mentale des femmes, mais aussi ce soupçon de raillerie.
Ce one-shot est ainsi très engagé sur les questions du conservatisme, du féminisme. Et c’est d’autant plus édifiant que ce titre paraissait dans un magazine seinen (destiné à un public masculin); je reconnais bien là l’avant-gardisme du magazine Garo.
Thématiques : 5/5
SHINKIRARI, en résumé :
💎 Ce que j’ai aimé :
- Les thématiques féministes fortes de l’oeuvre.
- Le déroulement discret du récit, presque secondaire derrière le quotidien.
- La banalité singulière de la protagoniste.
- Le trait plein de délicatesse et de justesse dans son expressivité.
🪨 Ce que j’ai moins aimé :
- Le dessin qui se révèle clivant malgré sa poésie.