Nouvelle review d’Halloween ! On a parlé de vampire avec Shigahime, on continue avec la critique de VAMPYRE chez le Lézard Noir !
C’est un manga qui s’adresse à un public averti ! ⚠️
TW : Nudité, actes sexuels, pédocriminalité, violence physique et psychologique, viol, harcèlement
VAMPYRE, une série en deux tomes !
Pour cette review, je me baserai sur la réédition de WARAU KYŪKETSUKI, oeuvre maîtresse de Suehiro Maruo. Le Lézard Noir nous propose un format A5, avec une belle reliure. Les couvertures sont rigides, avec des illustrations que je trouve particulièrement attractives. Le papier est très épais, sans transparence et l’impression rend très bien les aplats de noir que l’auteur utilise. Pour la faire courte… Ce sont de magnifiques objets ! Le tomes 1 et 2 comptent respectivement 244 et 288 pages !
Récit de la transformation d’une femme en vampire dans le Japon dévasté de l’immédiat après-guerre puis, de la contamination d’un adolescent, sous forme de chronique sociale, dans le Japon contemporain. Maruo observe le monde comme au travers de toiles d’araignée, et organise son petit théâtre des horreurs. On retrouve les figures et les postures favorites du maître de l’éro-guro organisées comme dans un opéra.
Si cela vous intéresse, c’est par ici !
Le Vampire vu par Suehiro Maruo, le maître de l’Ero-guro !
L’histoire de VAMPYRE débute avec une légende, celle de la femme chameau. Rejetée par tous pour son apparence, elle ressuscite sous une forme bien particulière… Elle n’aime pas la lumière, fuit le Soleil, et seul le sang peut étancher sa soif. Les caractéristiques classiques d’un vampire ! Konosuke Mori, protagoniste de l’oeuvre, va rencontrer cette femme et devenir lui-même un vampire. Suehiro Maruo décrit la transformation de ce jeune marginal et les interactions avec le monde infâme qui l’entoure avec son premier volume.
On suit ainsi son nouveau quotidien de vampire aussi effroyable et abject puisse-t-il être. Et pour ce qui est de nous horrifier, l’auteur fait preuve d’inventivité… Assurez-vous d’avoir le coeur bien accroché avant lecture ! Le second volume nous offre une narration différente. En reprenant le schéma d’un récit d’enquête, l’auteur nous propose une bonne dose d’action. Affrontements, courses poursuite, : les différents rebondissements qu’il introduit génèrent une dynamique haletante. C’est un volume prenant, mais bien plus classique dans sa construction.
Scénario : 3/5
VAMPYRE, c’est donc l’histoire de Konosuke Mori, mais ce n’est pas tout ! En effet, le premier volume s’articule autour de deux autres personnages. Luna Miyawaki, une jeune fille pour laquelle on se prend facilement d’affection tant elle incarne une lueur d’espoir dans ce monde de détraqués. Et Soto-o Henmi, un jeune homme qui cache ses vices sous des traits angéliques. À défaut d’être attachant, il est intrigant. Les trois personnages ont en commun d’être en marge de la société, de la masse populaire. Leur développement respectif est progressif et captivant à suivre.
Le tome 2 introduit de nouveaux personnages. Makoto, un jeune homme qui recherche désespérément sa soeur Miko. Mais également d’autres vampires. L’auteur instille beaucoup de mystère autour de ces nouveaux venus, peut-être un peu trop. En effet, on a parfois l’impression de ne pas connaître ces personnages, on ne s’attache pas à leur motivation. Sur ce point, c’est un peu dommage. Mais paradoxalement, Suehiro Maruo parvient à créer une sorte d’attachement, même s’il s’agit bien souvent de criminels ou de gens détestables…!
Personnages : 4/5
Du point de vue graphique, VAMPYRE est le parfait condensé de l’art de Suehiro Maruo selon moi. On y retrouve tout ce qui fait le style si particulier de cet artiste. La première chose qui nous frappe, c’est le réalisme noir de son trait. La maîtrise des aplats et des contrastes est impressionnante. Ensuite viennent ces scènes crues, parfois érotiques. Le sang coule à flot, et on voit bien d’autres choses innommables. Plus que de la violence, l’esthétique nous dérange, elle crée le dégoût. C’est là l’apanage de l’ero-guro, un style d’horreur dont Suehiro Maruo est un maître incontesté !
Les mises en scène se veulent théâtrales, pleine d’emphase parfois. L’ero-guro, c’est aussi l’exagération, le grand-guignolesque. L’auteur a une façon bien à lui de représenter le mouvement, de découper ses planches et l’ensemble regorge d’idées audacieuses ! La métamorphose, un thème central de l’oeuvre, prend une apparence kafkaïenne. Les insectes grouillant, les végétaux rampant, contribuent à nous mettre mal à l’aise. Mais de toute cette noirceur, de toute cette crasse se dégage une certaine poésie, et c’est ça qui est fascinant avec cet auteur.
Visuels : 5/5
Mais VAMPYRE ne dérange pas que par ses visuels. C’est une oeuvre avec un propos qui m’a particulièrement touché. L’auteur fait le choix de mettre en scène des adolescents, des individus qui cherchent leur place dans le monde adulte qui s’impose à eux. L’auteur dépeint un tableau grand-guignolesque. Une société abominable, violente, sans aucune morale. Dans cet univers crasse, les enfants se découvrent, mais ils sont contaminés par leur volonté de faire « comme les grands ». La violence, le sexe, la drogue : ils s’essaient à tous les vices de la société.
La transformation vampirique représente ainsi un passage à l’âge adulte alternatif. À travers la figure des buveurs de sang, l’auteur présente des personnes qui se transcendent. De mon point de vue, le vampire et sa jeunesse éternelle incarnent l’idée de conserver et préserver son enfant intérieur. On pourrait penser qu’il s’agit de jeunisme, mais des indices laissés par l’auteur suggèrent plutôt une réflexion autour de cette discrimination. Vous l’aurez compris je pense, VAMPYRE ne se contente pas de nous faire frissonner, c’est aussi une oeuvre qui peut s’interpréter !
Thématiques : 5/5
VAMPYRE, en résumé :
💎 Les points forts :
- Une esthétique sombre et poétique.
- Des personnages au développement captivant.
- Un propos fort qui invite à la réflexion.
- Un récit dynamique, qui prend aux tripes.
- Le titre de Suehiro Maruo le plus accessible.
🪨 Les points faibles :
- Un second volume moins marquant que le premier.