Pour cette review, on parle de manga d’horreur ! Voici mon avis sur les tomes 1 et 2 de ZONE FANTÔME par Junji Ito !
ZONE FANTÔME, tomes 1 et 2 !
Pour ces deux tomes de ZONE FANTÔME, Mangetsu nous propose des objets de qualité. Des couvertures rigides, un grand format et un papier épais et sans transparence : le prix me semble correct !
La jaquette présente à chaque fois une magnifique illustration reprenant l’ensemble des nouvelles présente dans le tome. On peut aussi noter le rendu mat, avec un vernis sélectif mais aussi le logo titre avec une dorure à froid.
À la suite d’un voyage improvisé, une jeune femme est prise de sanglots incontrôlables, un internat catholique au fonctionnement obscur semble vénérer la Sainte Vierge comme une divinité à part entière, la forêt tristement célèbre pour ses suicides qui s’étend au pied du mont Fuji devient le théâtre d’un déferlement d’âmes errantes et un étudiant en droit se demande s’il ne serait pas le tueur en série qui défraie la chronique depuis plusieurs jours… Traversez les frontières de l’étrange avec Junji Ito pour guide, dans ce premier recueil entièrement inédit.
Au delà de ça, chaque volume comporte une préface, une postface de Junji Ito lui-même ainsi qu’une analyse rédigée par Morolian.
Pour ce qui est du contenu, chaque tome de ZONE FANTÔME comporte quatre nouvelles. Cela peut sembler peu, mais elles sont plus longues qu’à l’accoutumée. En effet, l’auteur n’a pas eu à se conformer aux formats des magazines de prépublication puisque chacune des histoires de GENKAI SHITAI – The Liminal Zone est parue au format numérique (sur les applications LINE et AERA dot). Ainsi, Junji Ito a pu laisser sa créativité s’exprimer comme il l’entendait !
Par la suite, ces courts récits ont eu droit à une prépublication « classique » dans le magazine shōjo Nemuki+ de l’éditeur Asahi Shimbun. Eh oui, beaucoup de manga d’horreur sont des shōjo !
Tome 1 :
- Le coteau aux pleureuses (64 pages).
- Maudite madone (60 pages).
- La rivière spectrale d’Aokigahara (40 pages).
- Léthargie (42 pages).
Tome 2 :
- Le démon noir (66 pages).
- Le village de l’ether (68 pages).
- L’oncle Ketanosuke (46 pages).
- Les carapaces du marais Manju (34 pages).
Welcome to The Liminal Zone !
Avec ZONE FANTÔME, j’ai presque l’impression de redécouvrir Junji Ito. Les scénarios qu’il propose mettent en scène des situations variées, et font intervenir des mécanismes narratifs différents. Il n’y a aucune redondance. Néanmoins, l’objectif est toujours le même : nous faire ressentir un malaise. Si certains récits sont proches de ce que l’on connaît de l’auteur, la plupart s’en éloignent. Junji Ito cherche à se renouveler, et le résultat est réussi.
Ses histoires sont plus longues également. Cela permet une mise en place solide de la tension dramatique, un bon rythme et on a le sentiment que les récits trouvent leur fin quand il le faut. On est parfois frustré de ne pas avoir « plus », mais globalement, je trouve les conclusions satisfaisantes et moins nébuleuses qu’à l’accoutumée. J’ai senti l’auteur plus libre dans ces créations et expérimentations, il s’affranchit des conventions et des limites.
Scénarios : 4/5
Visuellement, ZONE FANTÔME est marqué par l’incursion du numérique dans l’œuvre de Junji Ito. On sent que ce dernier essaie, qu’il s’amuse avec des nouveaux outils. De nombreuses techniques sont employées, avec un tas d’astuces visuelles. Le pointillisme pour les apparitions spectrales, la luminance pour l’aspect éthéré.
Tout cela s’ajoute aux qualités préexistantes du dessin de l’auteur : la finesse et l’expressivité des visages, l’efficacité de la mise en scène, les doubles pages fourmillantes de détails macabres…
Au global, c’est maîtrisé, et le rendu vraiment immersif et effrayant. Malheureusement, il y a des tentatives qui m’ont un peu moins convaincu. C’est le cas du Village de l’Éther, qui tente une horreur plus froide, mécanique mais qui m’a fait le même effet qu’une 3D mal incrustée dans un anime… Il y a un décalage, mais il m’a paru plus maladroit que maîtrisé.
Visuels : 4/5
Si Junji Ito entend explorer de nouveaux horizons avec ZONE FANTÔME, il continue d’aborder ses thèmes de prédilection. On retrouve ainsi des personnages orphelins ou en marge de leur famille qui cherchent à s’extraire de leur situation. Subtilement, il est évidemment question de maltraitance infantile. Toujours en lien avec la famille, l’hérédité et l’héritage sont des sujets importants. L’auteur aborde aussi la relation homme-femme, l’influence néfaste que peut avoir la gent masculine.
Les transformations sont également évoquées, qu’elles soient physiques, liées à l’âge et inéluctables ou bien qu’elles soient synonyme d’une perte de contrôle. Comme il l’avait amorcé avec Sensor, l’auteur donne une place assez importante à la religion, parlant de dérives et convoquant l’iconographie chrétienne. Ces références sont parlantes pour nous, lecteurs occidentaux, mais les voir dans un manga à quelque chose d’agréablement déstabilisant.
Thèmes : 4/5
Évidemment, si on lit Junji Ito, c’est pour se faire peur… Et je pense que tout le monde trouvera son compte dans ZONE FANTÔME. Le fait d’avoir plusieurs histoires permet d’apporter l’horreur d’autant de façons différentes. On a droit à des récits proches des légendes urbaines, type creepypasta. Mais il y a aussi de l’horreur absurde, qui joue sur l’exagération et le grotesque.
Pour les fans d’horreur plus classique : vous serez servis également ! Du slasher, avec du sanglant qui tombe parfois dans le gore mais pas toujours ! Mais aussi des esprits, des possessions et bien d’autres choses !
Cependant c’est surtout la maîtrise de la liminalité qui permet à l’œuvre de nous happer. À plusieurs reprises, on découvre des lieux évocateurs où se confondent le réel et le fantastique, sans qu’on sache trop quand a lieu la transition… C’est la fameuse Zone fantôme, territoire de malaise et d’inquiétude..!
Horreur : 5/5
ZONE FANTÔME en résumé !
💎 Les points forts :
- Une gestion magistrale de l’horreur
- Les histoires sont bien construites
- Les dessins sont globalement effrayants
- Des thématiques intéressantes
🪨 Les points faibles :
- Certains récits moins convaincants
✨ Bonus :
- L’édition est magnifique !