Après Alma, Shinji Mito revient en France avec sa toute première série ! Voici mon avis sur l’intégrale d’Ex-Nihilo !
Ex-Nihilo – Intégrale en deux tomes
Fraîchement sorti aux éditions Pika, Ex-Nihilo bénéficie d’une belle édition ! En effet, ce sont deux jolis ouvrages de 300 pages chacun que l’on découvre. Les deux couvertures constituent une illustration une fois mises côte à côte. Une différence avec l’édition japonaise plutôt appréciable.
Pas de pages couleurs, mais on a droit à des bonus intéressants où l’auteur explique son processus de création, l’envers du décor du métier de mangaka.
Le monde se trouve entre leurs mains.
Alors qu’il n’aspirait qu’à une vie tranquille et rangée, le quotidien de Yukari Kamono est mis sens dessus dessous le jour où une immense créature blanche le prend en chasse, détruisant la ville sur son passage. Une mystérieuse jeune fille du nom d’Anya surgit alors à ses côtés pour lui venir en aide et lui révèle qu’il est, comme elle, un « Créateur » : un être ayant la faculté de matérialiser tout ce qu’il imagine. Mais qu’est-ce que cela signifie vraiment ? Et que veulent les gens qui se sont lancés à sa poursuite ? Si Kamono veut espérer survivre et obtenir des réponses à ses questions, il va devoir se battre.
Inception en manga ?!
Ex-Nihilo nous raconte l’histoire de Yukari Kamono, un lycéen de 18 ans. Un jour, une créature humanoïde immense apparaît avec la ferme intention de le tuer. À partir de là, tout va très vite pour Yukari : sa vie bascule. Il rencontre Anya, qui lui apprend que, comme elle, il est un Créateur et qu’il a donc la capacité de donner vie à ce qu’il imagine. Une aptitude qui suscite autant la crainte que la convoitise. C’est donc avec un rythme effréné de course poursuite que nous sommes plongés dans l’action.
L’intrigue prend un tournant encore plus vertigineux lorsque l’on découvre que les Créateurs peuvent aller jusqu’à créer l’Orbis ultime : Un nouveau monde…! Où s’arrête le réel ? Ou débute le factice ? Les frontières sont floues ! Sans trop nous perdre, l’oeuvre entretient notre curiosité et nous propose une intrigue sympathique, avec des rebondissements surprenants et une fin douce-amère!
On pourra noter quelques emprunts à des références de la science fiction, Matrix évidemment, mais aussi Inception. Alors si vous êtes fans de ces films… Ce manga devrait vous plaire ! En revanche, si vous n’êtes pas amateur d’histoires capillotractées, ce ne sera peut-être pas pour vous.
Scénario : 4/5
Un point m’a agréablement surpris dans Ex-Nihilo : ce sont ses personnages. Du fait du format court de la série, je m’attendais à des sacrifices. Bien souvent, c’est le développement des personnages qui en pâtit. Mais force est de constater que Shinji Mito s’est refusé à cela, et qu’il a construit intelligemment ses personnages.
Yukari Kamono pourra vous rappeler Shinji Ikari de Neon Genesis Evangelion, tout en étant bien moins apathique que ce dernier. (Ce qui n’est pas pour me déplaire). Tout au long de l’histoire, il évolue, passant d’un lycéen effacé à un jeune adulte capable d’affirmer ses convictions.
Un chemin différent de celui d’Anya ou Ivan, qui subissent leur condition de Créateurs depuis leur naissance et qui ont du grandir en conséquence. À leur première apparition, ils m’ont impressionné par leur prestance et leur assurance !
Mais Shinji Mito présente surtout les conséquences de ce don de création sur ses personnages. Des enfances détruites, parfois simplement inexistantes. Ce faisant, il nous livre des portraits de jeunes adultes très convaincants, et qui ne peinent pas à susciter notre empathie !
Personnages : 5/5
Visuellement, Ex-Nihilo est une première série plutôt jolie. Il y a un travail soigné sur les expressions des personnages, l’auteur ne peine pas à retranscrire leurs ressentis. Cela transparaît surtout dans les scènes intimistes qui jalonnent l’oeuvre. Le dessin appuie ainsi l’aspect psychologique, émotionnel du titre et renforce notre compréhension des jeunes adultes que l’on découvre.
Shinji Mito propose également de très belles scènes d’action, avec une certaine inventivité lorsqu’il s’agit de représenter les pouvoirs des Créateurs. Les mises en scènes sont inspirées et rendent le tout très dynamique. Les compositions sont claires et la lecture très facile.
À l’instar de ce qui a été fait dans Inception ou Matrix, l’auteur joue avec les perspectives. Il met en mouvement des pans entiers de ville, les détruits. La démesure est perceptible, du grand spectacle, vraiment impressionnant.
Néanmoins, le trait est un peu maladroit par moment. Dans les premières scènes d’action, on sent une certaine fébrilité pour représenter des confrontations fluides. Il arrive également que l’anatomie et les proportions soient un peu aléatoires.
Dessin : 4/5
L’autre réussite d’Ex-Nihilo, ce sont les thématiques choisies et la façon de les aborder.
D’abord, il y a le thème de la création. Comme une mise en abyme de sa propre situation, Shinji Mito confère à ses personnages la capacité de créer tout ce qu’ils imaginent. Cependant, cela ne se fait pas sans conséquences, et Yukari s’en rendra rapidement compte. Utiliser ses pouvoirs, créer, c’est devenir le centre de toutes les attentions.
Ensuite, il est évident que l’oeuvre traite de l’adolescence. Cette période de changement, de construction est un terreau fertile pour parler de la perception du monde par chacun.
Les différents acteurs de l’histoire ont tous 18 ans. Leur enfance est derrière eux, l’avenir s’ouvre devant eux. Mais comment se lancer sereinement dans la vie d’adulte lorsqu’on n’a pas eu d’enfance ? Car oui, en plus d’être tous de jeunes adultes, les personnages ont eu des enfances difficiles. L’imagination, la création, sont alors présentés et vus comme des refuges pour les Créateurs. Et l’enfance revêt alors une importance capitale pour la construction de l’adulte.
Le récit se révèle alors comme une oeuvre qui nous fait réfléchir, qui nous questionne de manière presque philosophique.
Thématiques : 5/5
Ex-Nihilo, en résumé:
Ex-Nihilo. « À partir de rien ». C’est à la seule force de leur imagination que les Créateurs peuvent donner naissance à leurs ambitions les plus folles.
Yukari Kamono découvre qu’il est l’un d’eux de la pire des manières : il est attaqué par un humanoïde géant qui veut sa mort. Heureusement pour lui, il fait la rencontre d’Anya, une Créatrice qui lui vient en aide et lui explique son pouvoir.
À partir de là, le récit s’engage sur un rythme effréné. Les scènes d’action s’enchaînent. Les rebondissements sont surprenants. Et la fin, douce-amère, est vraiment intéressante.
Visuellement, c’est dynamique, détaillé. Les planches où les villes sont détruites, où elles se déforment sous l’effet des créations, les orbis, sont magnifique. Et le soin apporté aux expressions des personnages est remarquable. C’est parfois un peu gauche, mais globalement, le titre est très bon pour une première série.
Mais la grande force de l’oeuvre, à mon sens, réside dans ses personnages. La plupart sont des jeunes adultes de 18 ans, de fait, cela permet d’aborder un grand nombre de thème : l’enfance, l’adolescence, l’avenir, la solitude.
Shinji Mito propose des portraits réalistes, crédibles. Les différents acteurs de l’histoire ont tous eu des enfances difficiles, si bien qu’on en arrive à éprouver de l’empathie pour chacun d’eux, antagonistes compris. Par la suite, ils ont droit à des développements convaincants, qui trouvent tous leur fin en l’espace de deux tomes.
Mise en abyme de la condition d’artiste et oeuvre très complète, aux thématiques fortes, Ex-Nihilo réussit à nous emporter malgré un format très court!