Il est temps de mettre la lumière sur le furyō ! Voici mon avis sur le tome 1 de la réédition de Rokudenashi Blues !
Une masterpiece pour une référence du furyō !
Pour le grand retour de Rokudenashi Blues, anciennement Racailles Blues, les éditions Pika ont mis le paquet. Le titre inaugure ainsi la nouvelle gamme « Pika Masterpiece ».
Cette réédition correspond à l’édition Bunko japonaise (on s’en contentera, même si on aurait préféré l’édition Kazenban). Elle comporte l’équivalent d’environ deux volumes de l’édition originale. Toutefois, celle-ci se présente en grand format, A5. Sur le dos du livre, on devine les prémisses d’une fresque (exclusive à la VF), qui s’annonce vraiment belle ! On peut également noter une page couleur, ainsi qu’un joli vernis sélectif sur la jaquette. Côté papier, la qualité est aussi au rendez-vous.
Des bons à rien qui iront loin!
Taison Maeda se réjouit de débarquer au lycée Teiken ! Mais la joie du garçon est de courte durée : dès la rentrée, il frappe un professeur “par mégarde” et se fait renvoyer quelques jours… À son retour, Maeda et ses deux acolytes, Katsuji et Yoneji, se retrouvent rapidement pris dans l’embrouille qui oppose le groupe des supporters et le club de boxe. Les nouveaux élèves vont vite se faire connaître, et surtout, tenter de se faire respecter. Une tâche bien compliquée, surtout lorsque Hatanaka, le capitaine du club de boxe qui avait été exclu, revient au bahut…
Artiste reconnu au Japon, Masanori MORITA a rencontré des difficultés pour s’exporter, et ce malgré plusieurs tentatives des éditeurs. Cette nouvelle mouture signera-t-elle les débuts de son retour en force ? Et avec ça, celui du furyō ? J’ose l’espérer ! Surtout avec le récent succès de Tokyo Revengers, une sorte de fils spirituel de l’oeuvre !
Rokudenashi Blues
Pour ce premier tome, Rokudenashi Blues nous propose une introduction complète. On découvre les lieux, les personnages, et un contexte global de rixe lycéenne. Rien d’extravagant dans l’exécution, Masanori Morita se contente d’aller à l’essentiel. Taison Maeda, ainsi que ses amis Katsuji et Yoneji, forment un groupe de lycéens qui ne savent s’exprimer qu’à travers leurs poings. Nouveaux dans l’établissement, ils doivent trouver leur place dans ce nouvel environnement; choisir le camp qu’ils défendront.
Mais Maeda est bien au delà de ces considérations. Lui, ne souhaite que protéger ses amis et devenir un boxeur professionnel. Un objectif simple, efficace mais qu’il sera difficile d’atteindre pour un chien fou comme lui ! Toujours est-il qu’une intrigue sportive se profile. Encore plus avec l’introduction de Hatanaka, le chef du club de boxe. Reste à savoir si elle aboutira ou si elle n’est qu’un prétexte pour toujours plus de bagarre. En somme, c’est un bon tome d’introduction, mais on attend encore de découvrir l’intrigue principale de la série. Et on espère un soupçon d’originalité aussi..!
Scénario : 3/5
Parmi les personnages de Rokudenashi Blues, il y en a un qui prend toute la lumière… C’est bien sûr Taison Maeda ! Il est le héros classique de shōnen : une tête brûlée avec un grand coeur, prêt à tout pour parvenir à ses objectifs. Les autres personnages sont tout aussi convenus. Cependant, tous ont quelque chose d’entier, de convaincant. On les adore ou les déteste mais ils ne nous laissent pas indifférent. Dans ce tome 1, le peu de développement n’a rien d’original. Les relations entre les personnages sont brutes, sincères comme cela se fait souvent dans le genre. Mais la recette fonctionne, il serait bête de ne pas s’en servir…!
Je noterai tout de même la tentative d’introduire une dimension romantique à l’oeuvre, avec le personnage de Chiaki Nanase. Ce n’est pas ce que je m’attendais à voir dans l’oeuvre, et j’avoue être un peu réticent à ce sujet. J’ai peur que ce soit « trop » pour le scénario.
Dans la version japonaise, l’accent du kansai de Taison refait surface lorsqu’il s’énerve. Ici, la traductrice, Pascale Simon a choisi de le faire bégayer. Un choix qui interroge, à voir si cela s’avère pertinent pour la suite.
Personnages : 3/5
Visuellement, je dois bien reconnaître que Rokudenashi Blues m’a mis une claque ; ou devrais-je dire une sacrée mandale ! Ancien assistant de Tetsuo Hara, Masanori Morita nous propose un trait réaliste, avec une belle maîtrise de l’anatomie humaine. Il en va de même pour le travail sur les arrières plans ou les expressions de visages. Pour moi, c’était un vrai régal ! (Et d’autant plus impressionnant quand on sait que les chapitres paraissaient à un rythme hebdomadaire…)
Évidemment, il y a quelques proportions qui m’ont interpellé. Elles avaient quelque chose d’approximatif. Mais globalement ça reste un excellent niveau de dessin. Qui plus est, il est pleinement en phase avec le récit conté. C’est nerveux, mais aussi très généreux. Morita aime dessiner, et il partage sa passion.
En tant que furyō, le manga nous propose évidemment de la grosse castagne, très immersive grâce à des plans rapprochés et de belles perspectives. Le découpage dynamique aide aussi à rendre chaque coup plus percutant, plus puissant. J’admire aussi la capacité de l’auteur à passer de séquences très sérieuses à des séquences comiques. Ça peut être simple à faire avec le scénario, mais avec le dessin c’est autrement plus complexe. Ici, Morita simplifie son trait, et joue sur l’exagération pour nous donner de vrais gags visuels!
Visuels: 4,5/5
Mais plus que l’histoire ou les personnages, Rokudenashi Blues c’est le partage et la transmission de valeurs fortes. C’est ce que, personnellement, j’appellerai l’esprit furyō. La loyauté, l’honneur, l’abnégation, l’amitié… Autant de principes louables que nos lycéens défendent à l’aide de leurs poings. Parce que le furyō, c’est ça aussi: c’est la bagarre, mais une bagarre « juste ».
Tout le monde se tape dessus. Le sang coule à flot, la douleur est difficilement supportable. Mais ce n’est rien : les valeurs doivent être défendue, coûte que coûte. La réflexion est limitée, occasionnant plusieurs situations comiques. Cependant, c’est un raisonnement des plus sincère.
Le tout à quelque chose de grisant, à l’instar du nekketsu, la détermination est primordiale, et elle permet de repousser ses limites. Mais à la différence du nekketsu, il y a une dimension plus viscérale. Aucune fantaisie, c’est la dure réalité de la vie. Et c’est quelque chose que le titre parvient à merveille à nous faire ressentir. Il y a une tension pour chaque combat. Et même si Taison Maeda ne montre que trop rarement des signes de faiblesse, on a parfois peur pour lui ou les autres.
Esprit furyō : 5/5
Rokudenashi Blues, en résumé
Rokudenashi Blues est un shōnen dont j’entendais parler depuis très longtemps. Alors quand j’ai reçu le tome 1 de l’édition Masterpiece de Pika Édition j’étais aux anges !
Mes attentes étaient grandes, mais j’avoue avoir beaucoup apprécié ma lecture. Même si l’œuvre commence à dater (1988 tout de même), elle n’a pas vieilli. À commencer par le dessin… Le trait de Morita m’a mis une immense mandale. Réaliste, nerveux, percutant : les visuels sont impressionnants !
En ce qui concerne l’histoire, ce premier tome pose des bases solides: lieux, personnages, contexte. C’est peut-être un peu lent, et on ne sait pas trop où on va, mais on sait où l’on est. Taison Maeda débarque dans un nouveau lycée et doit s’y faire sa place. Et il compte bien s’imposer à la force de ses poings. Une intrigue sportive se dessine, Maeda souhaitant devenir boxeur professionnel.
Mais j’ai également noté un début de romance. À voir si cela se développera par la suite ou non…! Personnellement, c’est une option qui ne me plaît pas trop; mais peut-être que Morita saura me convaincre…!
En revanche, là où la lecture devient grisante, c’est au travers des différentes rixes entre lycéens. Même si les combats sont violents, et très souvent sanglants, ils montrent une certaine pureté. En effet, les intentions derrière les bagarres ne sont jamais mauvaises, ce sont des conflits de loyauté, on se bat pour protéger des amis, ou des personnes plus faibles. Le manga prône alors des valeurs très positives; la détermination permet de repousser les limites, l’altruisme est mis en exergue.
En cela, Rokudenashi Blues ne démérite pas son statut de pilier du furyō !